Point de vue de François Asselin, président de la CGPME, suite à la tribune du Premier Ministre dans Les Echos
A chacun son pacte !
Le Premier Ministre, Manuel Valls, a confirmé ce jour dans Les Échos qu’au travers du Pacte de Responsabilité, « l’ampleur du soutien aux entreprises » ne sera pas remis en cause dans le Projet de Loi de Finances pour 2016. Cela mérite d’être salué mais pourquoi diable assortir cette phrase d’une simili menace sur le respect des engagements des entreprises ? Le Premier Ministre devrait pourtant savoir qu’un chef d’entreprise investit et embauche lorsque ses résultats d’une part et son carnet de commandes d’autre part, le lui permettent. Et en la matière les derniers chiffres de la croissance laissent planer un sérieux doute sur l’avenir.
Alors tous les efforts ont-ils été faits pour favoriser le retour de la croissance, chacun a-t-il pris ses responsabilités ?
La réponse est non. Ce n’est pas la « maîtrise des dépenses publiques » qu’il faut ambitionner mais, disons le enfin, leur diminution. La promesse de 2012 n’était-elle pas de ramener à l’équilibre en 2017 le budget de la France ? Aujourd’hui l’engagement « timide » est de ne pas dépasser plus de 3% de déficit à la fin du mandat actuel. Ainsi, est-il normal que plus de 57% du PIB serve à financer la dépense publique ? Comment voulez-vous que le secteur marchand, créateur de richesses … et de recettes fiscales ne soit pas asphyxié par ce déséquilibre qui fait tristement de nous les champions d’Europe. De plus, il est un tabou qui semble disparaître des écrans radars du gouvernement c’est celui de la baisse du nombre de fonctionnaires. Sait-on par exemple qu’en 2013 l’effectif de fonctionnaires a augmenté de 1,5%, soit 87 000 personnes supplémentaires ?
Réformer ne peut être un objectif en soi. Il est étonnant que nul n’ait chiffré les gains financiers attendus de la réforme de notre organisation territoriale. Avouons qu’il y a là de quoi s’inquiéter.
À l’inverse, il est positif que le Premier Ministre veuille « promouvoir le travail, encourager l’effort, l’initiative, la prise de risques et poser la question de la réforme du marché du travail. »
Après la réflexion, l’heure doit être à l’action. Un chef d’entreprise en capacité de le faire ne doit plus demain hésiter à embaucher. Les avantages d’un recrutement doivent prévaloir sur les inconvénients d’un licenciement. Mais renvoyer les règles applicables au seul accord collectif ne résoudra pas le problème pour l’immense majorité des entreprises françaises dans l’incapacité pratique de conclure des accords. C’est le Code du travail qu’il faut avoir le courage de revoir sans quoi la réforme ne bénéficiera qu’aux grandes entreprises, comme cela a été le cas pour les accords « maintien dans l’Emploi ». Et si une Loi Croissance 2, désormais annoncée, serait la bienvenue, une Loi Sur le Dialogue Social 2 est indispensable car la première, non contente de n’avoir rien réglé est venue alourdir considérablement les règles, à l’instar de ces nouvelles usines à gaz que sont les Commissions Paritaires Régionales applicables aux TPE.
Dans de telles conditions, il n’est guère étonnant que la « révolution numérique » entraîne un recul du salariat, comme le reconnaît Manuel Valls. L’enjeu n’est donc pas simplement de « garantir des droits » mais bien de ne pas rater ce virage sans sacrifier pour autant ni l’économie traditionnelle ni notre système de protection sociale. Il y a sans doute là une belle occasion d’organiser enfin les choses pour que le financement de celui-ci ne pèse plus seulement sur les revenus du travail.
Quant à la prise de risque et à la récompense des efforts, il serait utile de rappeler que les chefs d’entreprise patrimoniales sont les premiers concernés et que le moins que l’on puisse dire c’est que l’alourdissement de la fiscalité sur les SARL est une bien étrange façon de les récompenser. La baisse de la fiscalité promise ira-t-elle jusque-là ? Parviendra-t-on enfin à ce que les résultats réintégrés au capital des PME bénéficient d’un taux réduit d’IS ?
A nous entrepreneurs d’assurer le développement de nos entreprises. A vous, Monsieur le Premier Ministre, et à votre Gouvernement d’assumer les réformes structurelles tant attendues qui seules permettront de rendre factuel cet objectif. Ainsi, si l’acte le plus valorisant pour un Homme politique est de travailler au bien commun de son pays en le réformant, sachez que pour un chef d’entreprise embaucher reste l’acte dont il est le plus fier. A chacun son pacte !
François Asselin
Président de la CGPME